Abstract
Dans ce travail, nous nous sommes intéressés aux apports de la RMN et de la RMN dediffusion à l'étude, en suspension, de l'échange des ligands en surface de nanoparticules
(NPs) d'or. Plusieurs systèmes de nanoparticules d'or ont donc été synthétisés selon
différents protocoles bien précédemment décrits dans la littérature. Ces nanoparticules ont
dans un premier temps fait l'objet de diverses caractérisations "classiques" (microscopie
électronique en transmission, spectroscopie UV-Vis, ATG, ...) afin de déterminer leur taille,
leur distribution de taille et leur composition. Notre démarche a ensuite consisté à étudier
par RMN ces suspensions avec leurs ligands de surface d'origine, puis à étudier ses
suspensions après l'ajout de petites quantités d'un nouveau ligand qui pouvait être de même
type ou de nature différente.
Nous avons d'abord étudié des suspensions de NPs d'or, préparées par la méthode de
Brust, pour lesquelles le ligand de surface était du dodécanethiol (DDT). Par RMN 1H et
DOSY, nous avons réussi a démontré l'absence de DDT libre dans toutes nos suspensions
initiales. Nous avons également pu établir que la surface de ces NPs est saturée et que du
DDT ajouté en petite quantité (~5% du DDT déjà présent) reste libre.
Nous avons ensuite suivi l'échange des ligands in situ en rajoutant de faibles quantités
de nouveaux ligands. Dans le cas du dithiol (DHLA-Jeffamine M1000) nous avons pu montrer
que ce ligand se greffe seulement partiellement à la surface des nanoparticules et cela alors
même qu'il est ajouté en faible quantité par rapport au DDT lié à la surface (~5%). En
prenant en compte les effets de la relaxation sur les profils d'atténuation obtenus en RMN
DOSY, le taux de greffage à pu être estimé à environ 50%. Le recours à un di-thiol,
présentant une affinité pour les NPs a priori plus grande qu'un mono-thiol, ne semble donc
pas suffisant pour fonctionnaliser quantitativement des NPs d'or lors de l'addition d'une
faible quantité de nouveau ligand. Comme attendu pour une surface saturée, le greffage de
ce di-thiol conduit à la libération de DDT. Cependant cette libération n'est que transitoire et
même si une partie du DDT libéré se transforme en disulfure, la majeur partie se réadsorbe à
la surface des NPs, probablement suite à un réarrangement des ligands de surface.
Pour ces suspensions de NPs d'or stabilisées par du DDT, nous avons pu vérifier que
l'introduction d'une amine, l'oléylamine, ne conduit à aucun échange de ligand; l'amine
restant libre en solution sans interaction avec les NPs. Lors de l'addition d'autres monothiols,
le cis-9-octadécène-1-thiol (ODSH) ou le butyl-3-mercaptopropionate (BMP), la RMN a
permis de montrer que le nouveau ligand se greffe partiellement à la surface des NPs, en
libérant, en contre partie, du DDT en solution. Avec le BMP, le greffage est plus partiel et
plus lent qu'avec l'ODSH. Cette observation est en accord avec ce qui a déjà été observé lors
d'échanges réalisés en présence d'un excès de nouveau ligand : des ligands plus courts que
ceux originellement présents se greffent plus difficilement.
Dans ce manuscrit, nous nous sommes ensuite intéressés à des suspensions de NPs
d'or stabilisées par de la trioctylphosphine (TOP), qui ont été préparées par la méthode de
"digestive ripening". L'analyse de ses suspensions, par RMN 1H et 31P, a montré qu'elles
contiennent, en plus des NPs stabilisées par de la TOP (TOP@Au), de l'oxyde de
trioctylphosphine (TOPO) et un complexe d'or(I), Au(TOP)Cl, qui est caractérisé par un
déplacement chimique 31P de 21.9 ppm (dans CDCl3). En revanche, ses suspensions ne
semblent pas contenir de TOP libre, dont l'addition volontaire dans la suspension conduit à
sa transformation en complexe Au(TOP)Cl. Ce même phénomène a déjà été observé pour
des NPs d'or stabilisées par de la triphénylphosphine. De façon intéressante, une
différenciation spectroscopique a pu être mise en évidence entre le méthyle terminal de la
TOP en surface des NPs et les méthyles terminaux du TOPO et du complexe Au(TOP)Cl
également présents dans la suspension. Ce décalage de ~0.05 ppm, qui est associé à un
élargissement pour le signal du méthyle de la TOP liée, permet de clairement séparer les
signaux à 600 MHz et de réaliser leur quantification par simple intégration.
L'addition d'un thiol, le butyl-3-mercaptiopropionate, à une suspension de NPs
TOP@Au a ensuite été étudiée dans des conditions sous-stoechiométriques (RSH/TOP <1).
Le suivi, effectué par RMN 1H et 31P, laisse penser que ce nouveau ligand est
quantitativement greffé à la surface des NPs en une quinzaine d'heure (à température
ambiante). Les conditions sous-stoechiométriques et la quantitativité du greffage conduisent
à l'obtention de NPs ayant une couronne de ligands mixte. Cette voie de synthèse pourrait
par conséquent être intéressante pour l'élaboration de NPs de type Janus [Vilain, 2007]
[Harkness, 2011] [Kim, 2012]. La formation du complexe Au(TOP)Cl, observée suite au greffage du thiol, apparaît en accord avec ce qui a déjà été décrit pour de plus petites NPs
d'or stabilisées par de la triphenylsphosphine [Woehrle, 2005] [Sharma, 2009]a. Nos
résultats confortent l'idée que les vrais ligands de surface des NPs R3P@Au seraient les
complexes Au(R3P)Cl [Sharma, 2009]a,b. Nous avons également observé pour les suspensions
TOP@Au, que le greffage du BMP s'accompagne de l'apparition en solution d'oxyde de
dioctylphosphine. Cette observation laisse penser que ce composé, ou sa forme non oxydée,
ie. la dioctylphosphine, est à l'origine uniquement présent dans la couronne de ligands en
surface de NPs d'or, comme la TOP. Il apparaît donc que le système TOP@Au n'est peut-être
pas aussi idéal que des NPs d'or simplement stabilisées par de la TOP.
A la différence des chapitres II et III, dans lesquels des suspensions de NPS d'or en
milieu organique ont été étudiées, le chapitre IV a porté sur des suspensions aqueuses de
NPs d'or. Elles ont été préparées par la méthode de Turkevich dans laquelle des ions citrates
sont utilisés comme stabilisant. Ces dispersions étant fortement diluées et ces NPs ne
pouvant pas être isolées pour être redispersées à plus forte concentration, nous avons eu
recours à l'ultrafiltration pour les concentrer (jusqu'à 7 nM en NPs) et éliminer l'excès d'ions
citrates qui persiste en fin de synthèse. L'addition d'un dithiol, le DHLA-Jeffamine M1000, sur
ces NPs a été étudiée en suspension aqueuse. Il apparaît qu'une grande quantité de ce
ligand (~2x105 DHLA-Jeff par NPs) semble nécessaire pour réaliser son greffage sur les NPs.
Ces travaux réalisés sur différentes familles de NPs d'or ont confirmé la pertinence des
méthodes RMN en générale, et des mesures de diffusion en particulier, dans la
caractérisation des NPs en suspension. Ces analyses RMN permettent en particulier
d'étudier in situ le greffage d'un nouveau ligand qui est ajouté en faible quantité par rapport
au ligand déjà présent. Il est évident que ce type d'analyses est favorisé quand le nouveau
ligand présente au moins une résonance qui permet de le différencier de l'ancien. Dans une
approche basée sur la mesure de l'auto-diffusion, la mise en évidence d'une éventuelle
interaction entre le ligand et les NPs peut se faire au travers de signaux correspondant à des
motifs éloignés de la surface (ex. méthyle terminal pour une chaine alkyle) ce qui est
avantageux car ils sont généralement moins perturbés d'un point de vue spectroscopique,
en particulier pour ce qui est de leur largeur, que ceux à proximité de la surface. En revanche cette approche basée sur la diffusion ne donne pas d'indication sur la nature de la liaison
entre le ligand et les NPs. Elle montre juste si une interaction existe.
Même si heureusement cela ne constitue pas le cas général, nous avons pu constater
dans quelques cas que l'analyse d'une même expérience de RMN DOSY par différentes
approches (ie. ajustement des profils d'atténuation avec un modèle à deux populations ou
analyse de type GIfa MaxEnt) pouvait conduire à des conclusions différentes (ex. présence
ou non de ligand lié). Cet effet provient de la nature mathématiquement délicate de la
transformée de Laplace inverse qui est au coeur de la RM DOSY. Des données présentant des
rapports signal sur bruit importants, ce qui peut être contraignant en terme de temps
d'expérience quand on considère que ces mesures sont basées sur l'atténuation d'un signal,
sont donc importantes pour minimiser ce type de problèmes. La dilution des suspensions de
NPs d'or étudiées dans ce travail est clairement un handicap dans ce type d'étude.
La quantification des espèces uniquement au travers de leur comportement diffusif
apparaît également possible si l'on tient compte des effets de relaxation et/ou que l'on
vérifie que ces effets sont négligeables. Cette quantification reste cependant délicate à
mettre en oeuvre et requiert également des données avec des rapports signal sur bruit
important.
Malgré les limitations évoquées ci-dessus, la RMN DOSY est maintenant une technique
disponible en routine sur tous les spectromètres RMN modernes (les gradients de champ
pulsés ayant d'autres utilisations que la mesure des coefficients de diffusion). Et même si son
exploitation est parfois délicate, il serait dommage de se priver de cet outil pour l'analyse
des suspensions de NPs et par l'étude de leur fonctionnalisation, car s'il n'apporte pas toutes
les réponses, il donne des informations, en particulier sur la fonctionnalisation, que peu
d'autres techniques peuvent apporter.
Date of Award | 28 Mar 2013 |
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Original language | French |
Supervisor | Luk Van Lokeren (Jury), François O. Ribot (Promotor), Fabienne Testard (Jury), Marc - André Delsuc (Jury), Etienne Duguet (Jury) & Nicolas Lequeux (Jury) |
Keywords
- NMR
- Diffusion
- nanoparticle
- dispersion
- association
- affinity